Je suis Éric Ducroux, j’ai 54 ans. Mon parcours a débuté par un BTA, suivi d’un BTSA, puis d’un stage de six mois dans une ferme laitière au Québec. Après deux années comme ouvrier agricole, je me suis installé en 1996 avec mes parents en GAEC sur la ferme familiale du Bois Denis, située à Ouroux, dans le Beaujolais vert. À l’époque, la ferme comptait 57 hectares en zone de montagne et produisait principalement du lait de vaches, un peu de lait de chèvres, partiellement transformés en fromages. Un troupeau ovin complétait l’activité.
En 2010, au départ à la retraite de mes parents, je reprends seul l’exploitation.
J’oriente alors la ferme vers une spécialisation en production laitière bovine, abandonnant le troupeau caprin, tout en maintenant la transformation fromagère. J’élargis progressivement la gamme, en passant des lactiques aux tommes, puis aux fromages à pâte persillée.
Dès 2007, je modifie profondément le système fourrager pour sortir du modèle conventionnel : je passe à un système « tout herbe » basé sur les pâtures et le foin séché en grange. En 2011, je fais le choix de convertir la ferme à l’agriculture biologique.
La commercialisation évolue elle aussi : d’une vente principalement à la ferme, nous passons à un réseau plus diversifié, tourné vers la vente indirecte auprès de restaurateurs, magasins spécialisés bio et supérettes. En 2022, j’intègre comme associé le magasin « La Ferme en Ville », dans une logique de mutualisation et de circuit court. Au-delà de l’aspect commercial, faire partie de la Ferme en Ville, c’est aussi tisser des liens humains avec d’autres producteurs. On y partage des valeurs communes, mais aussi des moments de convivialité, des savoir-faire, et cette solidarité du quotidien qui rend le métier moins solitaire et plus vivant.
Aujourd’hui, l’exploitation compte toujours 57 hectares et une quarantaine de vaches laitières. Je suis en cours de conversion du troupeau vers la race jersiaise, reconnue pour la qualité de son lait, sa rusticité et son efficacité alimentaire – un choix réfléchi pour mieux faire face aux impacts du changement climatique. Nous travaillons actuellement à deux : moi-même et une salariée en fromagerie. Notre démarche repose sur des valeurs éthiques fortes : une agriculture la plus naturelle possible, respectueuse de l’animal et de son environnement. Nos vaches, en tant qu’herbivores, sont nourries exclusivement à l’herbe – l’alimentation la plus adaptée à leur physiologie.
Nous limitons la distribution de nos fromages à un rayon de 70 km maximum, pour rester dans une logique de résilience territoriale, de cohérence écologique et de proximité avec les consommateurs. La recherche du goût et du plaisir fait également partie intégrante de notre démarche. Enfin, j’ai à cœur de transmettre un jour mon outil de production pour faire perdurer cette activité et contribuer à la vitalité du Beaujolais vert, territoire auquel je suis profondément attaché